" Une production qui doit répondre à la demande "
Olivier Durand, maraîcher bio installé aux Sorinières, près de Nantes, a répondu au défi de Philippe Cléme nt, gérant de la Cantine du Voyage, à Nantes : fournir des produits frais au restaurant, en installant un potager en pleine ville.
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Au plus fort de la saison estivale, la Cantine du Voyage, un lieu branché en bordure de Loire sur l'Île de Nantes qui propose restauration, bar et animations, accueille près de 1 000 couverts par jour ! Désireux de s'approvisionner au plus près avec des produits de qualité, le gérant, Philippe Clément, s'est adressé à Olivier Durand, maraîcher bio installé aux Sorinières, au sud de Nantes depuis 2011. Il se trouve qu'à proximité immédiate du Hangar à bananes où se déploie la Cantine du Voyage de juin à septembre, existe un terrain bituminé vierge de tout aménagement. Pour relever le défi, le maraîcher s'est associé au jeune architecte Étienne Peneau, car les contraintes sont multiples. « Le premier défi était de mettre en place un système productif hors-sol sur une superficie relativement restreinte, de l'ordre de 700 m2. Le second challenge était de protéger le site, car le secteur est très fréquenté de jour comme de nuit, sans pour autant couper totalement le regard du public sur le potager. L'objectif est de donner à voir pour sensibiliser aux questions liées à l'agriculture urbaine », explique Olivier Durand.
> Optimiser l'espace. En référence à l'histoire des lieux, d'anciens docks, mais aussi pour permettre un aménagement réversible, durable et raisonnable en termes de coûts, Étienne Peneau décide de développer son projet en utilisant la palette comme élément unitaire. « Nous avons travaillé avec des palettes recyclées en pin traité haute température, issues du secteur alimentaire. Toutes les dimensions des allées, les rangées de culture, les hauteurs de travail ont été calculées sur cette base ». précise l'architecte. Au total, près de 2 700 palettes ont été nécessaires pour aménager les huit rangées de culture, des bandes de 2 mètres de large. Chacune est composée d'une partie haute permettant de travailler à hauteur d'homme et d'une partie un peu plus basse pouvant accueillir des châssis nantais qui s'appuient sur le bac haut. Ils sont intéressants pour protéger les semis précoces ou les cultures un peu fragiles. Les bordures des bacs de culture ainsi que la palissade entourant le site ont été réalisées en bardeaux de douglas brut de sciage. Le calepinage est finement pensé pour permettre de voir au travers de la clôture sans pour autant laisser la possibilité de faire passer des objets indésirables... « La conception d'ensemble a été à la fois guidée par des soucis d'ergonomie, de productivité et d'esthétique », explique Étienne Peneau.
> Semis et jeunes plants bio. En collaboration avec Tourbières de France, Olivier Durand a conçu un substrat - à base de terre végétale, tourbe et compost - adapté au contexte urbain du site. L'objectif est de bien conserver l'humidité, tout en permettant un drainage efficace en cas de précipitations abondantes. L'arrosage est optimisé et s'appuie sur un système d'irrigation par tuyaux poreux. Les seuls enrichissements du sol sont réalisés avec un apport de compost en surface tous les deux ans et par des semis d'engrais verts. Graines et jeunes plants proviennent de la pépinière maraîchère d'Olivier Durand, certifiée en agriculture biologique. La palette produite s'adapte au fil des années, en fonction des réussites et des échecs. Les salades constituent une valeur sûre, avec quatre variétés qui permettent d'étaler la production sur l'ensemble de la période d'ouverture du restaurant. Les plantes aromatiques et condimentaires ainsi que les fleurs comestibles font également partie des produits phares. En revanche, Olivier Durand envisage de revoir la technique de production des tomates cerises, car celle adoptée jusque-là - sur le sol - est trop complexe à gérer en période de pleine production. Globalement, les rendements du potager dépassent les attentes, avec près de 7 000 salades sur la saison 2016 ! « Nous bénéficions d'un microclimat favorable au maraîchage : il fait plus chaud et sec ici qu'à la campagne, d'autant que le sol recouvert de bitume et le bois des bacs restituent bien la chaleur emmagasinée en journée. Nous sommes relativement bien abrités du vent et, côté pollinisateurs, il y a plus d'insectes en ville qu'en zone agricole. Et pour certains pathogènes comme la mouche de la carotte, la culture hors-sol est un atout car l'insecte ne vient pas en hauteur », souligne Olivier Durand.Cette année, une vingtaine de fruitiers sont venus agrémenter les cultures maraîchères, des variétés anciennes de poiriers, pommiers, cerisiers et pêchers. Ils serviront de support pour la culture de concombres ou de haricots châtaignes, histoire d'optimiser l'espace !
> La passion de transmettre. Parce qu'il aime partager son savoir, Olivier Durand propose des animations au Potager de la Cantine : des échanges autour de l'agriculture urbaine et même des ateliers pour petits et grands, conseils pratiques et astuces afin de mettre en place un potager dans son jardin urbain. Les apprentis repartent avec un cahier pédagogique qu'ils pourront enrichir au fil de leurs expériences. Cet ingénieur agronome passionné de maraîchage et de cuisine, chouchous des grands chefs grâce aux variétés originales qu'il cultive aux Sorinières, fourmille de projets. Après le Potager de la Cantine en 2016, il a ensuite contribué avec Étienne Peneau à la création d'un petit potager de 200 m2 dans le jardin du restaurant étoilé l'Atlantide à deux pas du musée Jules Verne. Il y assure le choix des variétés en collaboration avec le chef et réalise les plantations. Il travaille aussi sur le projet de fermes urbaines dans le nouveau quartier Doulon-Gohards à l'est de Nantes.
Yaël Haddad
Olivier Durand (à gauche) et Étienne Peneau ont dû répondre à un défi : mettre en place un système productif hors-sol sur une superficie relativement restreinte, de l'ordre de 700 m2. YAËL HADDAD
Châssis nantais adossé sur les bacs de culture hauts pour optimiser l'utilisation de l'espace. YAËL HADDAD
Chaque rangée de culture est composée d'une partie haute permettant de travailler à hauteur d'homme et d'une partie un peu plus basse qui peut accueillir des châssis nantais. E. PENEAU
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